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mercredi 26 janvier 2011

Ecolo, le TGV ?

Derrière les protestations des usagers contre la hausse du prix des billets de train et les retards à répétition s'anime un débat qui pose les questions de fond. Car, après tout, les difficultés du chemin de fer découlent concomitamment de son succès et de son échec : nous prenons de plus en plus le train, mais Réseau ferré de France, qui entretient les voies, ploie sous une dette énorme, tandis que la SNCF court après son déficit.

Les raisons des difficultés sont multiples, mais pour nombre d'écologistes, le développement des lignes à grande vitesse (LGV) joue un grand rôle dans la dégradation. En mobilisant des investissements importants, il empêcherait l'indispensable entretien des lignes dites secondaires, qui relient les villes moyennes et petites aux plus grandes. Pour un opposant au projet de ligne Bordeaux-Bayonne, Victor Pachon, les TGV accélèrent "la concentration des activités autour des métropoles de niveau européen au détriment des villes moyennes". De son côté, l'économiste Julien Milanesi observe que les TGV profitent aux riches qui peuvent s'en payer les billets, au détriment des pauvres, qui doivent se contenter de trains à la qualité dégradée. Il pronostique l'amélioration des voies existantes : " Ce que nous perdrions en vitesse, nous le gagnerions en justice sociale."
A quoi Jean Sivardière, militant de longue date du chemin de fer et président de la Fédération nationale des associations d'usagers des transports, répond que le succès du TGV - 93 millions de passagers en 2009 - atteste de sa popularité, et que les trains rapides permettent de reprendre des parts de marché à l'avion et à l'auto, beaucoup plus polluants. Le débat est ouvert. Mais il semble qu'en période de disette économique, on ne puisse pas tout faire, et qu'il faudra choisir entre nouvelles LGV et trains classiques. Même si, comme le rappelle M. Sivardière, des ressources peuvent être trouvées du côté de l'avion, très subventionné, ou du carburant, dont le coût réel en termes de pouvoir d'achat serait moindre qu'en 1970.
Des élus commencent à prendre position. En octobre 2010, Europe Ecologie-lesVerts et le Parti de gauche ont protesté en région Rhône-Alpes contre la dégradation du réseau secondaire du fait de l'excès d'attention accordé au TGV. Ségolène Royal, en Poitou-Charentes, a donné, en décembre 2010, un avis négatif au projet de LGV Poitiers-Limoges : "La pertinence socio-économique (en) reste à démontrer", écrit-elle, en demandant d'étudier les autres possibilités, comme le prévoyait la loi Grenelle de 2009. C'est le bon sens : il est temps de discuter vraiment de l'avenir du chemin de fer.

Courriel : kempf@lemonde.fr.
Hervé Kempf

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