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dimanche 30 janvier 2011

L'islamiste Rachid Ghannouchi de retour en Tunisie

Après vingt-deux ans d'exil, Rachid Ghannouchi, chef de file du mouvement islamiste Ennahda, a regagné dimanche la Tunisie où plusieurs milliers de personnes l'attendaient.Lire la suite l'article
Son retour est l'un des signes les plus forts du changement survenu en Tunisie depuis le renversement le 14 janvier de Zine ben Ali au terme d'un mois de contestation sociale et politique dans la rue.
Rachid Ghannouchi, qui est âgé de 69 ans, est considéré comme un intellectuel modéré. Son organisation, fondée en 1981, est aussi perçue comme moins conservatrice que les Frères musulmans égyptiens.
"Notre rôle sera de participer à la réalisation des objectifs de cette révolution pacifique: ancrer un système démocratique, la justice sociale et limiter les discriminations contre les organisations interdites", a-t-il déclaré à Reuters à la veille de son retour. "Le dictateur est tombé et je souhaite être dans le pays", a-t-il ajouté.
Ennahda, qui signifie Renaissance en arabe, se dit proche idéologiquement du Parti de la justice et du développement (AKP) au pouvoir en Turquie.
Cette organisation était la principale force d'opposition en Tunisie. Aux élections de 1989, deux ans après la prise de pouvoir de Ben Ali, elle avait obtenu officiellement 17% des voix, mais son score réel était sans doute plus proche de 30 ou 35%, selon des observateurs. La répression qui s'est alors abattue sur elle a contraint Ghannouchi à un exil londonien en 1989.
La présence de milliers de personnes dimanche à l'aéroport de Tunis-Carthage constitue une démonstration de force sans précédent en faveur d'Ennahda depuis deux décennies.
"Non à l'extrémisme, oui à l'islam modéré", pouvait-on lire sur une des banderoles déployées par les partisans de cheikh Ghannouchi. "N'ayez pas peur de l'islam", exhortait une autre.
"Nous ne voulons pas d'un califat islamique, nous voulons un Etat démocratique", explique Mohamed Habasi, venu accueillir Ghannouchi. "C'est nous qui avons le plus souffert de l'absence de démocratie", ajoute-t-il.
Un peu plus loin, une dizaine de militants laïcs se sont eux aussi rassemblés pour dire leur rejet de "l'islamisme, de la théocratie, de la charia et de la stupidité".
APAISEMENT
Les islamistes n'ont pas paru jouer un rôle moteur dans le mouvement de contestation qui a abouti au renversement de régime. Mais le retour de Rachid Ghannouchi pourrait les galvaniser et des analystes estiment que la mouvance islamiste est à même de devenir un force politique de première importance dans la Tunisie de l'après-Ben Ali.
Le calme est globalement revenu en Tunisie depuis l'exclusion jeudi du gouvernement des anciens caciques du régime de Zine ben Ali.
Les forces de sécurité tentent de rétablir l'ordre à Tunis, où des commerçants se sont opposés à des manifestants pour réclamer un apaisement de la situation.
Le gouvernement intérimaire de Mohamed Ghannouchi - sans lien de parenté avec le chef de file des islamistes - n'a toujours pas annoncé la date des élections promises.
Des responsables d'Ennahda ont dit que leur parti participerait aux élections législatives mais qu'il ne devrait pas présenter de candidat à la présidentielle.
Et Rachid Ghannouchi a lui-même affirmé qu'il ne désirait concourir à aucun mandat électif. "Il existe une autre génération, une génération plus jeune, qui a les qualifications nécessaires pour briguer ces postes", a-t-il dit.
Habib Bourguiba, "père" de l'indépendance vis-à-vis de la France, a mis en place un régime laïque en Tunisie et considérait l'islam politique comme une menace. Zine ben Ali, son successeur, a ensuite imposé des restrictions aux organisations islamistes à son arrivée au pouvoir avant de les réprimer franchement deux ans plus tard.

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