15 000 Egyptiens manifestaient contre le gouvernement mardi 25 janvier 2011. Ils ont été dispersés au canon à eau.
REUTERS/Amr Abdallah Dalsh
Au Caire, 20 000 à 30 000 policiers ont été déployés et le quartier du ministère de l'Intérieur a été bouclé.
"Moubarak dégage." Est-ce le début de la contagion? Desmanifestations hostiles au pouvoir égyptien ont lieu ce mardi en début après-midi à l'initiative de mouvements d'opposition s'inspirant de la révolte tunisienne. Quelque 15 000 personnes participaient ce mardi après-midi au Caire, face à un déploiement policier massif, à des manifestations pour des réformes politiques et sociales, inspirées par l'exemple tunisien.
Parmi la foule venue sur la grande place Tahrir, au centre du Caire, Ibrahim, un juriste de 21 ans, ne mâche pas ses mots : "nous avons un régime corrompu qui veut poursuivre l'oppression sans fin". Ahmed, un avocat de 28 ans, a lui aussi suivi avec passion la fuite sous la pression populaire du président tunisien Zine El Abidine Ben Ali, après 23 ans de pouvoir, contre presque 30 pour Hosni Moubarak. "Nous devons aujourd'hui nous tenir debout comme des hommes, enfin", affirme-t-il.
Dans le centre du Caire, des manifestants rassemblés aux abords de la Cour suprême ont réussi à forcer un barrage de police et à se répandre dans les rues alentours en scandant "la Tunisie est la solution". Le mouvement s'est ensuite étendu au quartier de Mohadessine, dans l'ouest de la capitale où 2 à 3 000 personnes se sont rassemblées. Les manifestants criaient "à bas Moubarak", le président égyptien, âgé de 82 ans et en place depuis 29 ans.
20 000 à 30 000 policiers ont été mobilisés dans le centre-ville, et le quartier du ministère de l'Intérieur a été bouclé, selon les services de sécurité. Les effectifs des forces de l'ordre étaient renforcés à plusieurs grands carrefours de la mégalopole égyptienne, les manifestants ayant prévu de se rassembler en plusieurs endroits. L'Université du Caire était elle aussi sous haute surveillance des forces anti-émeutes.
Des manifestations suivies dans le reste du pays
Des rassemblement étaient également signalés en province, notamment à Alexandrie (nord), la deuxième ville du pays, à Assouan et Assiout (sud). Plusieurs mouvements militant pour la démocratie avaient appelé la population, au Caire, à manifester pour faire de mardi une "journée de révolte contre la torture, la pauvreté, la corruption et le chômage". Plus de 90 000 personnes se sont déclarées sur Facebook prêtes à manifester.
A Ismaïliya, sur le Canal de Suez, quelque 200 à 250 personnes se sont rassemblées sur une place du centre-ville face à un fort dispositif policier.
Dans le nord de la péninsule du Sinaï, des centaines de personnes ont coupé une route entre al-Arich et Rafah, près de la frontière avec la bande de Gaza, en mettant le feu à des pneus, selon des témoins.
Cette journée coïncide avec la "Journée de la police", un jour férié destiné à rendre hommage aux forces de l'ordre.
Le ministre de l'Intérieur, Habib al-Adli, a déclaré au journal gouvernemental al-Ahram que les organisateurs des manifestations étaient "inconscients" et a assuré que leurs appels n'auraient "pas d'impact". "Les forces de l'ordre sont capables de faire face à toute menace contre la sécurité de la population, et nous ne prendrons à la légère aucune atteinte aux biens ni aucune infraction à la loi", a-t-il ajouté.
Un mouvement soutenu timidement
Cette "journée de révolte" qui s'adresse en particulier aux jeunes, a notamment reçu le soutien de l'opposant Mohamed ElBaradei, ancien responsable de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Les manifestations ont reçu l'appui d'autres formations politiques, qui n'ont toutefois pas lancé d'appels formels à descendre dans la rue.
Les Frères musulmans, à la forte capacité de mobilisation, et le Wafd, premier parti d'opposition laïque, ont indiqué que leurs jeunes militants pourraient se joindre aux cortèges.
Avec plus de 80 millions d'habitants, l'Egypte est le pays le plus peuplé du monde arabe, et plus de 40% de sa population vit en dessous d'un seuil de pauvreté de deux dollars par jour et par personne.
Plusieurs immolations par le feu ont eu lieu ces derniers jours en Egypte, rappelant celle d'un jeune vendeur ambulant tunisien mi-décembre, qui avait déclenché la révolte en Tunisie.
Le pouvoir de son côté a multiplié ces derniers jours les déclarations assurant que l'Egypte ne présentait pas de risque de contagion à la tunisienne. Les autorités ont toutefois laissé entendre qu'elles prenaient des dispositions pour éviter toute hausse des prix ou pénurie des produits de base, afin de ne pas aggraver le climat social.
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