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dimanche 27 février 2011

L’impasse politico-institutionnelle actuelle : un nouveau défi au génie béninois

La majorité parlementaire à l’Assemblée Nationale n’en a cure ; cela ne lui dit rien apparemment que des Béninois pensent qu’elle avait préparé minutieusement son coup dans l’objectif de bloquer le processus électoral en paralysant la CENA : 1)    nomination d’un nombre ridicule de membres de la CENA à laquelle  ne peuvent siéger les membres du SAP/ CENA, afin de parvenir à bloquer l’institution quand ses représentants démissionneront ;
2)    blocage du processus de désignation des représentants de l’Assemblée Nationale dans les CEC et les CEA, ce qui paralysera d’office la CENA et obèrera le processus électoral.
Que vise-t-elle ce faisant ? Empêcher la tenue dans les délais constitutionnels de l’élection présidentielle de 2011 afin d’exciper de ce blocage pour contraindre la mouvance présidentielle à écouter ses points de vue au sujet de la LEPI.
Nous dirons tout de suite qu’on joue avec le feu, car il n’y a plus aucun arbitre sauf la force armée, quand on sort des prescriptions constitutionnelles et légales ; à moins d’ouvrir la voie à l’Etat d’exception qui est la seule voie offerte par notre Constitution pour sortir de l’impasse causée par le blocage des institutions légales et constitutionnelles, à savoir le recours à l’article 68 qui donne derechef pleins pouvoirs au Président de la République dont on critique déjà la soi-disant dictature ! Certaines méthodes choisies en l’occurrence sont critiquables. Aussi la scène que nous ont offerte nos illustres députés ce fameux jeudi 17 février 2011 ne nous honore guère. Quand dans une institution républicaine, on en vient à la voie de fait, cela veut dire que l’Etat de droit a foutu le camp et la culture démocratique avec. Oui ! Ce coup-ci, l’intelligence a vraiment déserté le forum. Notre opposition se sent brimée, humiliée peut-être ; mais a-t-elle le droit de se faire justice à sa manière en décidant, non pas de refuser de désigner ses propres représentants dans les CEC et les CEA, ce qui serait une protestation acceptable dans une démocratie où tout citoyen a le droit de manifester son mécontentement, mais de bloquer unilatéralement le processus électoral en cours en rejetant par la violence physique la seule voie légale qui reste pour parvenir à désigner les derniers représentants de l’Assemblée Nationale à la CENA ? A-t-elle seulement le droit d’exciper de l‘argument discutable que 1.300000 Béninois n’ont pas été enregistrés, pour décider de son propre chef qu’on doit arrêter le processus électoral et reporter au-delà de la date fatidique du 06 mars prochain le premier tour du scrutin ? Ce faisant, elle a violé plusieurs articles de la Constitution et surtout une célèbre décision de la Cour Constitutionnelle qui recommande le consensus,  principe à valeur constitutionnelle, dans les débats politiques. Aussi en venir à contester violemment l’application d’une décision de la Cour Constitutionnelle, c’est se rebeller contre la Haute Juridiction en matière constitutionnelle, le seul juge du contentieux électoral, le seul arbitre et l’organe régulateur du fonctionnement régulier des institutions (article 114 de la Constitution) ; c’est ouvrir la boîte de Pandore de la pagaille, étaler le tapis rouge pour un coup de force militaire ! Un coup d’Etat est toujours possible dans notre pays et nous devons garder en esprit la réaction d’un officier supérieur de nos Forces Armées qui a dit que l’armée avisera si les politiciens –tous bords confondus- veulent amener la nation à la déchéance ! Seulement, nous sommes en politique où toutes les stratégies implicites ou explicites sont bonnes pour renverser l’adversaire et prendre sa place.
Aussi les hommes du régime doivent-ils prendre en considération ce fait important qu’ils n’ont pas l’opinion publique pour eux en ce moment sur le sujet délicat de la LEPI et que personne, sauf les affidés du régime, ne lèvera le petit doigt pour contester l’argumentaire de l’opposition qui manifestement a remporté deux batailles politiques de taille :
-         la création du Front de Défense de la Démocratie et donc l’enrôlement des leaders syndicalistes à sa cause et à la bataille de la LEPI;
-         le gain des autres candidats (11 sur 14) à la bataille de la LEPI.
Donc les contestations qui entourent la LEPI et dont les solutions passeraient selon l’opposition par un report de la date constitutionnelle du 06 mars (avec l’impasse politico-constitutionnelle qui s’ensuivra forcément le 5 avril 2011) sont devenues des données immédiates de la conscience de tous les Béninois. Il faut donc se rendre à l’évidence que la mouvance au pouvoir qui manque cruellement de grands ténors et vieux briscards du jeu politique comme les responsables de l’UN, n’a pas actuellement la situation en main ; Boni YAYI risque d’être emporté par une révolution populaire habilement fomentée, comme celle dans laquelle le peuple béninois s’est laissé imbriqué le 28 octobre 1963 !

Ce n’est pas le moment de montrer ses muscles et de se surpasser en arrogance. Il faut dialoguer pendant qu’il est encore temps ; comme le Général Mathieu KEREKOU en février 1990 : « Ne me dites pas : démissionne » ! Comme nous sommes dans une véritable impasse et que de sérieuses menaces pèsent sur la paix sociale, pourquoi ne pas prendre en compte les propositions des 11 candidats avec cette exception salvatrice : le Président de la république ne démissionnera pas. Il aura plutôt recours à l'article 68 de notre Constitution :« Lorsque  les institutions de la République, l’indépendance de la Nation, l’intégrité du territoire national ou l’exécution des engagements internationaux sont menacés de manière grave et immédiate, et que le fonctionnement des pouvoirs publics et constitutionnels est menacé ou interrompu, le Président de la République, après consultation  du Président de l’Assemblée Nationale et du Président de la Cour Constitutionnelle, prend en conseil des Ministres les mesures exceptionnelles exigées par les circonstances sans que les droits des citoyens garantis par la Constitution soient suspendus….. .» Seuls des politiciens roublards s’opposeront à une telle solution de consensus national ; le peuple qui a mordu à l’hameçon des 1.300000 personnes exclues du ficher électoral se tiendra coi ; j’en suis sûr. Aussi persister dans la ligne actuelle est suicidaire pour le régime en place. Encore une fois, plaçons aux commandes le génie béninois. Seulement, personne n’a le droit de violer la Constitution, pas même le Président de la république ; surtout pas lui, car il serait parjure à son serment. Or, c’est apparemment ce que lui demande une certaine classe politique lors donc qu’elle lui suggère de reporter le premier tour des élections présidentielles au-delà du 06 mars ; ce qui aura pour conséquence immédiat le non-respect d’un autre délai constitutionnel : la proclamation le 05 avril 2011 de l’élection du nouveau Président de la République. Il est évident que si les élections ne peuvent pas avoir lieu le 06 mars et que donc la date du 05 avril 2011 ne peut pas être respectée, de graves menaces pèsent alors sur le fonctionnement normal et constitutionnel des institutions. Le Chef de l’Etat, Président de la République, est ainsi habilité à recourir à l’article 68 devant la situation d’impasse politico-constitutionnelle ainsi crée. Bien qu’il soit le seul juge en la matière, l’esprit de dialogue et donc la recherche du consensus, principe à valeur constitutionnelle, l’obligent à recourir au dialogue avec l’ensemble de la classe politique afin que tombent la tension et la crispation actuelle.  Le génie béninois, c’est d’abord le triomphe de la Raison, attribut essentiel de l’homo sapiens, sur les passions animales qui ne profitent à personne en fin de compte. Les marches en l’état actuel des choses sont inutiles, car personne n’a actuellement le pouvoir de reporter la date limite du premier tour des élections présidentielles qu’est le 06 mars. Mais si l’opposition réussit à bloquer le processus en paralysant le fonctionnement régulier de la CENA, ce sera elle qui portera la responsabilité des violations graves de notre Constitution et de l’impasse politico-constitutionnelle qui s’en suivra. Il ne restera alors aux démocrates béninois qu’à constater les graves menaces qui s’annoncent à l’horizon, et à comprendre que le Président de la République puisse recourir à l’article 68, la seule alternative constitutionnellement acceptable sans coup de force, civile ou militaire.

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